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Idées Noires – Franquin (Audie, 1981-84)

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Je me rappellerai toujours de mes impressions lorsque j’ai lu cet album pour la première fois. C’est poilant et flippant, attirant et dégoûtant. C’est surtout virtuose. Comment est-il possible que ce soit le même dessinateur que celui de notre gaffeur préféré. Depuis, je n’ai jamais pu lire Gaston de la même façon…

Pourtant, les thématiques abordées sont les mêmes. Franquin dénonce l’absurdité de nos sociétés modernes qui foncent droit dans le mur de la technologie et de la performance.  Ecologiste reconnu, c’est un défenseur acharné des animaux et un humaniste convaincu. C’est juste la manière qui change. A l’instar de son amis Gotlib (qui édita ces Idées Noires), Franquin marque un virage trash-gore-scato qui lui sert, on le sait, de catharsis dans une période de grande dépression.

Franquin est une référence absolue pour plusieurs générations d’auteurs. Il est marrant de constater que son parcours professionnel est à l’exacte inverse de la plupart des auteurs actuels qu’il influence. Faire la majeure partie de sa carrière dans les plus grand journaux d’après guerre (Spirou, Tintin…) pour aboutir en 1977 dans un fanzine parasite (Le Trombone Illustré dans Spirou) ou une jeune revue qui fleure bon l’underground (Fluide Glacial), est quelque peu… iconoclaste.

Sans aller jusqu’à dire que Franquin est un punk, ses idées noires reflètent parfaitement l’esprit pessimiste et nihiliste de son époque. 1977 marque la naissance du mouvement No Future, où s’affirme cette nouvelle génération désabusée qui crache littéralement à la gueule des valeurs paternalistes. Et c’est ce que fait Franquin lorsqu’il déglingue les vieilles traditions (la chasse, la pêche, la corrida…) et toutes ces institutions aliénantes et destructrices (militaires, scientifiques ou religieuses).

Alors que la mort est omniprésente dans ces pages, son graphisme atteint ici un degré de vivacité jamais égalé. Ces ombres noires amplifient à l’excès les mouvements de ses personnages qui dansent, sautent, volent, s’écrabouillent, perdent la tête ou explosent avec une grâce folle… Franquin nous confirme ici qu’il est le maître incontesté de l’onomatopée (MOP, BOP, SLOP, PNOP!).

Même quand il broie du noir, il nous fait rire. Ce rire ravageur, salutaire, parfait exutoire à nos angoisses les plus refoulées, nos peurs les plus primales. Plus proche du « Bête et Méchant » que des petits mickeys de chez Dupuis, ses bandes anthracites auraient pleinement trouvé leur place chez Charlie ou Hara-Kiri. Mais c’est grâce à Fluide Glacial que l’on peut se délecter, ad nauseam, de ces douceurs macabres.

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L’humour bête et méchant bande toujours…

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Sale période pour les bêtes et les méchants. Après le forfait de Siné pour cause de crevaison, c’est le bien nommé « café bête et méchant » qui ferme ses portes, faute d’avoir trouvé un plus large public. A croire que les amateurs de cet humour « coup de pieds au cul » se font plus rares, à l’image de ses créateurs… La réalité est bien plus conne. Un mauvais timing. Le patron Christophe Bétémé à déposé le nom de son troquet le 5 janvier 2015 et a ouvert ses portes rue de Montreuil (dans le 11ème, pas loin de Charonne) fin octobre… Autant dire la poisse. Pourtant, les ingrédients étaient parfaits.

Christophe est un passionné généreux et grand collectionneur de tout ce qui concerne Hara-kiri, Charlie Hebdo et leurs nombreux satellites. Et leurs auteurs bien évidemment. Une somme incroyable (il a TOUS les numéros!), qu’il te met à disposition (si t’es sage) avec, ça va de soi, un bon verre (d’Anosteké Prestige, par exemple). J’ai pu ainsi tenir dans mes petites mains frêles et moites le premier numéro d’Hara-kiri, le premier Charlie hebdo, des numéros de Zero ou Cordées avec Cavanna comme rédacteur en chef, le Hitler = SS de Gourio et Villemin en hors série original, un almanach avec des dessins et mises en pages de Sépia/Cavanna…

Bref, le Café Bête et Méchant restera pour ceux qui l’auront connu un lieu unique et incontournable qui ne sentait pas la poussière et la nostalgie, mais la bonne bouffe (le gars Christophe sait mijoter) et le bon vin (on y trouve logiquement les vins de Gérard Descrambe et avons goulayé une excellente « chochotte du boulon »). Un lieu vivant, faisant la part belle aux expositions et concerts, servant aussi de décors pour un court métrage. Surtout, on y fait de belle rencontre, une clientèle aux petits oignons avec les camarades Delfeil de Ton, Gébé et Topor fils, JC Menu, Pacome thiellement, Yves Frémion, etc… J’ai eu pour ma part l’occasion de rencontrer la petite Virginie. Oui, celle de Cavanna. Elle est tout à fait comme il la décrit dans Lune de Miel. Une belle rencontre. Merci Christophe.

L’humour bête et méchant est immortel. Suffit de voir les belles rééditions (chez Les Cahiers Dessinés ou Wombat) qui foisonnent : Topor, Gébé, Delfeil, Choron, Fournier, le Lune de Miel encore dispo… Et le Siné Mensuel qui continue le combat ! On a encore de quoi s’en mettre plein la gueule !

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Topor encore…

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On ne les arrêtent plus ! Les excellents Cahiers Dessinés creusent un peu plus encore dans les méandres de l’œuvre de Roland et mettent en lumière l’un de ses aspects peu connu et jamais compilé jusqu’alors. Après le dessinateur de presse, place au Topor illustrateur. Voyageur du livre. Le titre est parfait. Car s’il est un aventurier du dessin, défrichant des territoires inconnus et impensables, Topor peut se faire simple voyageur, se laissant guider par les balises d’autrui. Que ce soit de commande ou de son propre chef (esclave de ses passions, il n’illustre que ce qu’il aime), des auteurs mythiques ou des contemporains inconnus, Topor s’immisce sans dénaturer, respecte ou transgresse, interprète les obsessions de l’autre en y insufflant les siennes. « Lorsqu’il dessine dans la presse, Topor fait prévaloir son imaginaire sur l’actualité immédiate. En tant qu’illustrateur, il accepte une position plus complexe, plus à l’écoute de l’autre et à la recherche d’une résonance commune. » (Philippe Garnier en préface).

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Belle complémentarité avec les éditions Wombat, qui rééditent Le Chinois du XIVème de Melvin Van Peebles, illustré par Topor en 1964 dans les pages d’Hara-Kiri. Alors que le premier volume [1960-1980] du Topor Voyageur de Livre compile ses illustrations « hors textes », ce Chinois du XIVème  nous permet de les resituer dans leur contexte. On se rend compte qu’en quelques traits (ses dessins pour l’occasion sont vifs et contrastés), il cerne parfaitement les tensions dramatiques de ce conte philosophique de comptoir, le climax de chaque nouvelle. Il sait aussi s’arrêter sur des détails qui en disent long. L’anecdote et l’universel, une fois encore…

Wombat continue son remarquable travail de réédition des écrits de Roland et annonce la sortie de Joko fête son anniversaire pour le 19 février… Miam !

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Top, Or…

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C’est vrai qu’il est régulièrement réédité le bougre. Et à chaque fois, j’ai l’impression d’une nouvelle rencontre. Normal me direz vous, puisse qu’il est multiple et a œuvré dans d’innombrables champs. On en découvre encore. Un dingue indomptable, qui ne supporte aucunes barrières. Qui grave les mots et les formes avec la même désinvolture. Qui laisse dans le marbre les traces de son incompréhension du monde. Qui sublime l’horreur pour mieux la dénoncer…

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Les éditions Wombat continuent leur superbe travail de réédition des œuvres de Roland. Après La plus belle paire de seins du monde en début d’année, ils s’attellent cette fois ci à un aspect peu connu de l’artiste : auteur de bande dessinée. Strips panique regroupe toutes ses histoires par la bande (dont l’intégrale de La vérité sur Max Lampin), qu’il a semé tout au long de sa prolifique carrière (de 1962 à 1996). Étonnant pour quelqu’un qui, de son propre aveux, n’a jamais vraiment été attiré par la neuvième chose. Ses histoires ont plutôt la forme des illustrés d’antan (texte en cartouche sous le dessin ou format strip des quotidiens presse) que des planches BD modernes. A l’exception notable de P’tite Mort, diffusée dans le premier numéro du Psikopat. Comme s’il associait le neuvième art à ses lectures d’enfances, et ne le considérait pas comme un mode d’expression important. Dommage pour les fans comme moué, ils nous restent à imaginer ce qu’aurait pu donner un roman graphique de Topor…

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Autre aspect plus connu, mais qui méritait bien une anthologie d’au moins 360 pages, c’est le Topor dessinateur de presse. Depuis son premier dessin publié en couverture de la revue Bizarre en 1958, puis dès 1961 dans Hara-Kiri, on sait le Roland fidèle à cette discipline, dans laquelle il est rapidement devenu un maître de l’humour noir et surréaliste. Un espace très codifié (lien avec l’actualité, parfaite lisibilité…) qu’il pervertit de l’intérieur en y injectant une forte dose d’obsessions et fantasmes. De grands « coups de poings dans la gueule » comme le dit Jacques Vallet en préface. Un magnifique ouvrage des Cahiers Dessinés.

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Le romancier et critique littéraire Salim Jay dit Merci Roland Topor. Merci à l’ami, à l’homme, à l’artiste. Un récit de prime abord décousu, reposant sur une succession de souvenirs et de thèmes sans rapport apparent (Topor face à Dieu, la Belgique, la philosophie, Godard et Duras, le Mexique…) mais qui dans le fond, dresse un panorama plutôt complet de l’artiste. Souvenirs de lecture des œuvres de Roland, souvenirs de personnes l’ayant rencontré ou écrit sur lui, Salin Jay convoque un casting aussi improbable que celui des Mémoires d’un vieux con, dressant ainsi ce qu’on pourrait nommer un « réseau Topor ». Salim ne cache pas son admiration (partagée) et rétabli quelques contre-vérités, le tout dans un style tendre et franc. Une écriture confidente qui rend la lecture passionnante.

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Méta Mune Comix – Jean Christophe Menu (L’Apocalypse, 2014)

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Cet ouvrage prend la forme d’un recueil de six comics, dont on ne sait s’ils existent indépendamment les uns des autres. La numérotation commençant à partir du n° 111, Menu brouille les pistes et laisse supposer que d’autres comics antérieurs à ceux-ci existeraient. Encore et toujours cette volonté d’inscrire ses albums dans une généalogie particulière, de susciter de vieux souvenirs à ses lecteurs (quand on découvrait l’existence d’autres volumes d’une série ou les numéros d’un magazine qu’on venait de terminer…), nous amenant à imaginer le contenu d’anciens comics qui n’existent sûrement pas (à part les 5 tomes de Mune Comix sortis chez Cornelius entre 1993 et 1994). De cette manière, Menu installe une agréable complicité.

Il revisite cette bande dessinée traditionnelle, qu’il inscrit dans une forme de nostalgie de ses lectures d’enfance, tout en ouvrant sur de nouvelles perspectives : autobiographie et reportage, chroniques culturelles (le n°112 est un « spécial Rock’n'Roll »), mais aussi récits métaphysiques, voire pataphysiques, s’appuyant sur des souvenirs diffus, des délires(rium!)… Ce Méta Mune Comix est un condensé, un concentré de toute ses approches et obsessions. On y retrouve du Lock Groove, du Mont Vérité, du Meder, du Livret de phamille, des réflexions théoriques, des expérimentations oubapiennes, et bien entendu du Mune Comix…

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Description d’une réalité ou transcription d’un univers mental, Menu s’aventure entre ces deux pôles d’attraction avec une formidable liberté créative. Influencé par les avant-gardes littéraires et artistiques du vingtième siècle, en particulier le surréalisme, on pourrait supposer qu’il n’est pas indifférent à la psychanalyse. Bien que cela ne semble pas être une référence volontaire de sa part, et sans tomber dans les écueils réducteurs de l’analyse de comptoir (le symbole de la Mune n’indiquerait-il pas que Menu est un garçon lunaire et lunatique?), il est possible de visiter son œuvre par le prisme d’une approche analytique. Au delà de l’aspect cathartique de certaines de ses planches (dans lesquelles il se livre sans tabous sur ses névroses, ses addictions), on observe dans sa production de nombreux thèmes propres à la discipline : interprétation des rêves, libération de la parole et affirmation du moi, expression de l’inconscient (parfois collectif)…

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Il n’est pas simple de raconter un rêve, même par la bande. Possédant sa propre logique, il est impossible d’en retranscrire le déroulement avec des codes narratifs stricts et limités. Plutôt que d’en raconter le contenu précis et tenter d’interpréter pour en dégager du sens, Menu s’attache à retranscrire cet enchaînement incontrôlable de scènes propre au déroulé d’un rêve. Une écriture automatique qui évoque parfaitement cette impression diffuse et résiduelle (faite de fascination mêlée d’appréhension) que l’on conserve au réveil. Rêves absurdes ou cauchemars, Menu excelle dans l’exercice et sème ces comptes rendus tout au long de ces six numéros.

Menu prône une autobiographie sans mensonges ni tabous. Ce qui pose le problème de la représentation des personnes qui l’entourent. Car poser sur papier imprimé, donc susceptible d’être lu de tous, des éléments concernant la vie privée de vraies personnes n’est pas sans conséquences liées au droit à l’image, et peut faire apparaître la pratique autobiographique comme un manque de courage flagrant, l’auteur préférant dire ce qu’il pense de quelqu’un par l’intermédiaire du médium. Est-ce pour ces raisons que les récits autobio de Menu présents ici abordent essentiellement son entourage professionnel, ses rencontres musicales ou ses déboires existentiels mais, à l’exception de sa mère (et de sa 4L), ne concernent plus les membres de sa famille…

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S’il cite volontiers des figures et des formes connues de la bande dessinée (l’équipe d’Hara-Kiri, le chronoscaphe de Black et Mortimer, le Z de Zorglub…), Menu s’amuse surtout avec ses codes narratifs, des plus traditionnels (principe du « à suivre », personnages récurrents, sens de la mise en page, art du lettrage) aux plus expérimentaux (les formes abstraites de Mollux, les planches métaphysiques de L’Autre], la pataphysique du Mont Vérité…). Une autre manière de créer la complicité avec ses lecteurs, puisant dans un « back ground » commun à tout amateur de la neuvième chose.

JC Menu bouscule les rapports entre fond et forme (ses textes sont souvent en décalage par rapport à ses images), signifiant et signifié (à l’image de son Meder qui s’exprime dans un langage incompréhensible, mais pas insensé) et circule parmi toutes ces dimensions avec une dextérité et un sens de l’a propos qui en font un auteur toujours passionnant, traçant ainsi une impressionnante « méta œuvre », qui va bien au-delà du simple divertissement en bande dessinée.

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