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Trois fois rien – Petra Mrzyk & Jean-François Moriceau (Les Requins Marteaux, 2006)

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Trois fois rien de Petra Mrzyk et Jean-François Moriceau, ouvrage composé uniquement de dessins sans aucuns textes, corrobore une idée que beaucoup ne partagent pas : lire du dessin n’est pas si simple qu’il n’y parait et demande un certain apprentissage. Un ensemble d’images ne fonctionne pas comme un ensemble de mots. Si dans un texte chaque mot n’a d’utilité que si on le relit aux autres – il en est de même pour une planche de bande dessinée, chaque case n’ayant de sens qu’en la resituant dans la temporalité de celles qui les entourent – le recueil de dessins lui, nécessite une autre approche. Le travail de Mrzyk et Moriceau nous confronte à cela.

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Nous devons lire chacun de leurs dessins indépendamment des autres, tout en les reliant, non pas aux seuls précédents et suivants, mais à un ensemble plus vaste. Un réseau de signifiants se dévoile au fil de la lecture et des thématiques apparaissent, des effets de matières se répondent, des figures se font échos… Flammes, poils, végétaux… solides, liquides… visages, morceaux d’anatomie, transformations corporelles… notre rapport à la sexualité, la nourriture, le temps, la mort… sans oublier les figures mythiques modernes (le Bibendum Michelin, Mickael Myers, Ernest & Bart, Yoda…). L’air de rien, les auteurs dressent un sacré panorama de nos vices et obsessions. Un univers que n’aurait renié un Roland Topor.

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L’espace de la feuille, ouvrant sur deux dimensions, s’en trouve ici illimité, avec cette profondeur de champ que créé ce noir et blanc strict. Les auteurs se jouent du cadre, décalant un dessin dans un coin de page, au point de laisser les trois quart de la feuille blanche. A l’inverse, ils n’hésitent pas à surcharger l’espace de compositions qui flirtent avec le cadavre exquis. Contraste entre ses formes simples, aux traits vifs et un travail méticuleux sur les textures (dentelles, textiles, plumages…). Contraste aussi entre dessins à l’humour absurde (voir ces formes rondes changées en carrés) ou salace (avec ces mains qui courent après des nichons ou des doigts après des nez…) et concepts philosophiques (ne sommes nous pas tous des cadres sans images ?)

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Poussant leur collaboration plus loin encore que Dupuy et Berberian ou Ruppert et Mulot, il est quasiment impossible de savoir qui fait quoi. Bien malins ceux qui les distingueraient. Entre cadavres exquis et écriture automatique, les auteurs jonglent avec les styles, les genres et les focales sans jamais perdre en cohérence, tant ils vont au bout de leur démarche à chaque fois. Trois fois rien est une expérience de lecture unique et brillante. 

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Trois fois rien

Collection revue 4 (éditions En Marge, 2014)

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Pour son quatrième numéro à la couverture patchwork plutôt… originale (qui a dit moche ?), sorti en octobre 2014, la revue Collection change de format, sans pour autant perdre en qualité (une gageure, vu le niveau du n°3). Plus grande (passant d’un 16,5x23cm à un 21×29,7cm) et toujours aussi classe, Collection est une revue qui sait faire honneur aux artistes et leurs œuvres, avec ces belles impressions couleurs sur un fin papier glacé. Si « la revue autour du dessin contemporain » a changé de forme, elle conserve son concept éditorial, basé sur ces interviews/échanges faites entre deux artistes. Ainsi que son bilinguisme (français/anglais). Pourquoi changer une équipe qui gagne !

Au menu de ce quatrième opus, j’avoue ne connaître que deux artistes : Daniel Clowes et le rare Pierre La Police. Comme à chaque fois, je commence par ceux que je connais, pour découvrir les autres ensuite. Et cette fois encore, je fais des découvertes, entre les formes franches et primitives de José Maria Gonzalez, la 3D de Ronan Bouroullec, l’éclectisme coloré d’un Leon Sadler ou les obsessions noires et blanches de Karl Nawrot…

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Alberto Do Paris

Aussi, un article passionnant sur la peinture en aérosol pratiquée par des artistes de rue du monde entier. Une discipline à priori foutraque et stéréotypée, qui s’avère bien plus subtile et complexe qu’elle n’y paraît. Possédant ses maîtres fondateurs (Ruben « Sadot » Fernandez, Gerardo Amor…), ses techniques propres et divers courants (space art, abstraction…), le Spray Paint Art s’expose dorénavant dans les galeries, tout en conservant sa dimension marginale originelle.

Richesse des supports, des techniques, des disciplines, des motifs… Collection n’usurpe pas sa place de défricheur d’un domaine artistique où la frontière entre génie et arnaque est bien mince. Cette revue demeure pour moi une balise annuelle, rendant pleinement compte de la diversité du dessin contemporain.

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Pierre La Police

collectionrevue.com

Brèves de chroniques #5

Frissons d’espace – Denis Jourdin (Futuropolis, 1989)

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Sorti en 1989 dans la collection X de Futuropolis (l’ancien), Frisson d’espace est un récit d’espionnage industriel sur fond de guerre froide. Guy Lamour, un ingénieur bossant sur la fusée Ariane, se retrouve la cible d’un complot visant à lui soutirer des plans pour les services secrets soviétiques. Nina Jalousesco est chargée de l’amadouer mais tombe sous son charme et compromet toute l’opération… La particularité de Denis Jourdin est qu’il n’aime pas les phylactères, alors que ses personnages sont bavard. Du coup, les mots débordent sur les visages et les décors, sans pour autant surcharger les cases. Sa ligne claire bancale est très lisible. Ses formes excessives et stylisées m’évoquent un Mokeit light ou un Rémi soft.

Lapin n° 28 (L’Association, Mai 2001)

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On retrouve Jourdin dans le Lapin n°28 qui date de 2001, soit en pleine période faste, loin des guerres intestines qui bousculeront l’Association quelques années plus tard. En atteste la présence des six fondateurs, ainsi que le noyau dur d’amis et collaborateurs (Anne Baraou, Ayroles, Sfar, Blain, Parrondo, Gerner, Blanquet, Satrapi, Benoit Jacques, Valoni, Placid…). Un numéro de la deuxième formule (« quinquannuelle ») comprenant des récits courts conçus pour l’occasion (pas de pré-publication). Ainsi qu’un dossier sur le festival de Bastia 2001, prenant la forme d’une succession de strips réalisés par divers auteurs (procédé que l’on retrouvera dans l’Éprouvette). Un numéro de haute tenue, pertinent et passionnant à lire, même quatorze ans après sa sortie.

La Putain P – De Vries & Feuchtenberger (L’Association, 1999)

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La Putain P des allemands De Vries et Feuchtenberger ne raconte pas l’histoire d’une, mais de trois putains. La première n’arrive pas à aimer, la deuxième est en quête d’amour et la troisième cherche une naissance… Soit trois variations sur la notion de désir. Il se dégage une forte personnalité du graphisme de Feuchtenberger, qui s’inscrit dans la lignée des expressionnistes : de nombreuses contre plongées, des perspectives distordues, des noirs gris et blancs sales et charbonneux, mal coloriés… Un album de l’Asso exigeant, tant dans sa forme que son propos, qui ne brosse pas le lecteur dans le sens du poil. Tout pour déplaire à Mr Filippini en somme.

Chronique K.BD – Le petit livre de la Bande Dessinée

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Nous terminons notre sélection estivale sur K.BD avec Le petit livre de la Bande Dessinée, un album bien sympathique qui plaira assurément à tout amateur du 9ème Art. Sur près de 200 pages, Hervé Bourhis et Terreur Graphique dressent un historique du médium, qui commence dès l’âge de pierre…

Une synthèse by myself…

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Soluto, peintures & dessins (Galerie des Artistes, 2015)

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N’ayant pu me rendre à une exposition de Soluto qui avait eu lieu à Dieppe il y a deux ans, j’ai enfin pris ma revanche en ce début juillet grâce à la Galerie des Artistes (Paris 20ème), où j’ai pu enfin admirer ses œuvres (dommage de n’avoir pu me rendre au vernissage). Et prendre ainsi la pleine mesure de ses compositions, ses techniques employées, ses choix esthétiques. Observer son trait, saisir son geste…

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Belle rencontre avec Stéphane Gamain, un galeriste comme on aimerai en voir plus souvent. Échanges passionnant avec un passionné, excellent dessinateur au demeurant. Son lieu est superbe, beau, sans fausse modestie. La mise en scène est bien pensée, le sous-sol voûté, espace intimiste s’il en est, donne la part belle au Soluto dessinateur de « Vies à la ligne » (mis en valeur par un superbe accrochage), alors que ses grandes toiles avaient besoin de l’espace lumineux de la grande salle pour s’épanouir et nous en mettre plein les mirettes.

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Ses couleurs sont splendides (gouache pour les portraits et acrylique pour ses grandes compositions, si jeune Mabuse). J’aime ce travail de la matière, très charnelle, cette parfaite maîtrise des contrastes chaud-froid, en particulier dans l’un de ses paysages urbains (ci dessus) où les bleus nuits crépusculaires se confrontent aux orangés lumineux. Magnifique. Ses paysages et ses portraits partagent cette exigence d’un rendu tout à la fois réaliste et expressionniste. Ses teintes parfois fauves en disent long sur les sujets représentés. Je suis surpris par les colories qui sont quasi les mêmes que ceux de ses reproductions. Ce qui ne m’étonnes pas, venant d’un perfectionniste comme lui. Stéphane me confirme ce que je savais déjà, Soluto travaille essentiellement d’après ses propres photos. Ce qui explique cette approche quasi hyperréaliste, cette précision dans les attitudes, les regards, les gestes…

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Je remercie encore Soluto et Stéphane pour cette superbe exposition, point d’orgue d’une bien belle journée.

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