Archives pour la catégorie Plein les mirettes



Topor encore…

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On ne les arrêtent plus ! Les excellents Cahiers Dessinés creusent un peu plus encore dans les méandres de l’œuvre de Roland et mettent en lumière l’un de ses aspects peu connu et jamais compilé jusqu’alors. Après le dessinateur de presse, place au Topor illustrateur. Voyageur du livre. Le titre est parfait. Car s’il est un aventurier du dessin, défrichant des territoires inconnus et impensables, Topor peut se faire simple voyageur, se laissant guider par les balises d’autrui. Que ce soit de commande ou de son propre chef (esclave de ses passions, il n’illustre que ce qu’il aime), des auteurs mythiques ou des contemporains inconnus, Topor s’immisce sans dénaturer, respecte ou transgresse, interprète les obsessions de l’autre en y insufflant les siennes. « Lorsqu’il dessine dans la presse, Topor fait prévaloir son imaginaire sur l’actualité immédiate. En tant qu’illustrateur, il accepte une position plus complexe, plus à l’écoute de l’autre et à la recherche d’une résonance commune. » (Philippe Garnier en préface).

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Belle complémentarité avec les éditions Wombat, qui rééditent Le Chinois du XIVème de Melvin Van Peebles, illustré par Topor en 1964 dans les pages d’Hara-Kiri. Alors que le premier volume [1960-1980] du Topor Voyageur de Livre compile ses illustrations « hors textes », ce Chinois du XIVème  nous permet de les resituer dans leur contexte. On se rend compte qu’en quelques traits (ses dessins pour l’occasion sont vifs et contrastés), il cerne parfaitement les tensions dramatiques de ce conte philosophique de comptoir, le climax de chaque nouvelle. Il sait aussi s’arrêter sur des détails qui en disent long. L’anecdote et l’universel, une fois encore…

Wombat continue son remarquable travail de réédition des écrits de Roland et annonce la sortie de Joko fête son anniversaire pour le 19 février… Miam !

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Trois fois rien – Petra Mrzyk & Jean-François Moriceau (Les Requins Marteaux, 2006)

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Trois fois rien de Petra Mrzyk et Jean-François Moriceau, ouvrage composé uniquement de dessins sans aucuns textes, corrobore une idée que beaucoup ne partagent pas : lire du dessin n’est pas si simple qu’il n’y parait et demande un certain apprentissage. Un ensemble d’images ne fonctionne pas comme un ensemble de mots. Si dans un texte chaque mot n’a d’utilité que si on le relit aux autres – il en est de même pour une planche de bande dessinée, chaque case n’ayant de sens qu’en la resituant dans la temporalité de celles qui les entourent – le recueil de dessins lui, nécessite une autre approche. Le travail de Mrzyk et Moriceau nous confronte à cela.

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Nous devons lire chacun de leurs dessins indépendamment des autres, tout en les reliant, non pas aux seuls précédents et suivants, mais à un ensemble plus vaste. Un réseau de signifiants se dévoile au fil de la lecture et des thématiques apparaissent, des effets de matières se répondent, des figures se font échos… Flammes, poils, végétaux… solides, liquides… visages, morceaux d’anatomie, transformations corporelles… notre rapport à la sexualité, la nourriture, le temps, la mort… sans oublier les figures mythiques modernes (le Bibendum Michelin, Mickael Myers, Ernest & Bart, Yoda…). L’air de rien, les auteurs dressent un sacré panorama de nos vices et obsessions. Un univers que n’aurait renié un Roland Topor.

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L’espace de la feuille, ouvrant sur deux dimensions, s’en trouve ici illimité, avec cette profondeur de champ que créé ce noir et blanc strict. Les auteurs se jouent du cadre, décalant un dessin dans un coin de page, au point de laisser les trois quart de la feuille blanche. A l’inverse, ils n’hésitent pas à surcharger l’espace de compositions qui flirtent avec le cadavre exquis. Contraste entre ses formes simples, aux traits vifs et un travail méticuleux sur les textures (dentelles, textiles, plumages…). Contraste aussi entre dessins à l’humour absurde (voir ces formes rondes changées en carrés) ou salace (avec ces mains qui courent après des nichons ou des doigts après des nez…) et concepts philosophiques (ne sommes nous pas tous des cadres sans images ?)

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Poussant leur collaboration plus loin encore que Dupuy et Berberian ou Ruppert et Mulot, il est quasiment impossible de savoir qui fait quoi. Bien malins ceux qui les distingueraient. Entre cadavres exquis et écriture automatique, les auteurs jonglent avec les styles, les genres et les focales sans jamais perdre en cohérence, tant ils vont au bout de leur démarche à chaque fois. Trois fois rien est une expérience de lecture unique et brillante. 

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Trois fois rien

Collection revue 4 (éditions En Marge, 2014)

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Pour son quatrième numéro à la couverture patchwork plutôt… originale (qui a dit moche ?), sorti en octobre 2014, la revue Collection change de format, sans pour autant perdre en qualité (une gageure, vu le niveau du n°3). Plus grande (passant d’un 16,5x23cm à un 21×29,7cm) et toujours aussi classe, Collection est une revue qui sait faire honneur aux artistes et leurs œuvres, avec ces belles impressions couleurs sur un fin papier glacé. Si « la revue autour du dessin contemporain » a changé de forme, elle conserve son concept éditorial, basé sur ces interviews/échanges faites entre deux artistes. Ainsi que son bilinguisme (français/anglais). Pourquoi changer une équipe qui gagne !

Au menu de ce quatrième opus, j’avoue ne connaître que deux artistes : Daniel Clowes et le rare Pierre La Police. Comme à chaque fois, je commence par ceux que je connais, pour découvrir les autres ensuite. Et cette fois encore, je fais des découvertes, entre les formes franches et primitives de José Maria Gonzalez, la 3D de Ronan Bouroullec, l’éclectisme coloré d’un Leon Sadler ou les obsessions noires et blanches de Karl Nawrot…

alberto do paris

Alberto Do Paris

Aussi, un article passionnant sur la peinture en aérosol pratiquée par des artistes de rue du monde entier. Une discipline à priori foutraque et stéréotypée, qui s’avère bien plus subtile et complexe qu’elle n’y paraît. Possédant ses maîtres fondateurs (Ruben « Sadot » Fernandez, Gerardo Amor…), ses techniques propres et divers courants (space art, abstraction…), le Spray Paint Art s’expose dorénavant dans les galeries, tout en conservant sa dimension marginale originelle.

Richesse des supports, des techniques, des disciplines, des motifs… Collection n’usurpe pas sa place de défricheur d’un domaine artistique où la frontière entre génie et arnaque est bien mince. Cette revue demeure pour moi une balise annuelle, rendant pleinement compte de la diversité du dessin contemporain.

pierre la police

Pierre La Police

collectionrevue.com

Absconcités – Klub (Rannou/Facéties, 2015)

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Dès sa première parution dans le Psikopat il y a deux-trois ans, j’ai tout de suite adhéré à l’univers loufoque et déjanté de Klub. Je souhaitais en parler, mais il n’avait pas encore sorti d’album. C’est maintenant chose faite grâce au camarade Maël qui inaugure sa collection Facéties avec ces fameuses Absconcités.

Klub nous démontre que le bon humour con est toujours pertinent. Que l’absurde, quand il est finement employé, apporte un recul salutaire et ravageur sur les choses absconses de l’existence (la vie, la mort, la religion, la folie, la politique, l’écologie…). Son humour  est souvent cynique et cruel (comme notre monde d’ailleurs), ne lésinant pas sur le gore et le scato. En contre-point, il use de jeux de mots foireux et de calembours à la con (genre : « Jeanne Darc Vador »). Son style « gros-nez trash » n’est pas sans évoquer ces camarades du Psiko, Ivars, Caritte ou Carali.

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Klub dénonce nos comportements « panurgiens » de primates civilisés (une formule qui n’est pas flatteuse pour les grands primates d’ailleurs), obnubilés que nous sommes par l’assouvissement de nos besoins les plus primaires et nos pulsions les plus inavouables. Mine de rien, il en dit beaucoup avec une formidable économie de moyen, touchant à chaque fois l’essence même du gag. Cadrages, attitudes, expressions des personnages, dialogues… tout ces éléments sont placés au millimètre.

Qu’elles soient réelles ou fictives, Klub convoque et revisite les figures mythiques de notre culture moderne (Babar, Batman, Darth Vador, le Diable, Dracula, Godzilla, Hitler, sorcières, extra-terrestres…). Il a une affinité particulière avec Jesus, lui consacrant une bonne dizaine de gags bien corsés. En cette période tristounette, lire du Klub devrait être prescrit.

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Editions Rannou

Crazy – Florian Pourias & Stanislas Gros (Rannou/Libres Courts, 2014)

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Crazy est le premier ouvrage de la jeune maison d’édition Rannou, dans la collection Libres Courts. Maël a crée cette structure afin de présenter les diverses formes possibles du lien entre textes et images. Bande dessinée, dessins humoristiques, textes illustrés… Dans ce cas présent, un poème théatral illustré.

Florian Pourias nous raconte la folie, celle qui détruit. Un thème difficile. Car tenter de décrire la structure mentale d’une personne qui se déconnecte de la réalité est quasi impossible, tant on ne peut rationaliser (par l’exercice de l’écriture) ce qui échappe à la raison. Toutefois, les choix narratifs de l’auteur – structurant son récit entre les pages de gauche qui nous installe dans la tête du personnage principal, ses pensées, ses ressentis et les pages de droites qui racontent ses relations au monde, le dialogue avec son médecin – conviennent parfaitement pour rendre compte du décalage permanent entre la vie intérieure du sujet et ses interactions avec le monde extérieur. Ces allers-retours constant entre ces deux dimensions font la force du récit. Comme il est dit en préface : « le texte est donc partagé entre raison et folie, à l’image du protagoniste ».

Loin de brouiller les pistes ou d’être redondantes, les illustrations de Stanislas Gros (au noir et blanc expressif) apportent une troisième dimension au récit. Parfois les images racontent et amènent des pistes de compréhension. Parfois les textes illustrent la psyché du personnage en prenant la forme de calligrammes disloqués.

Crazy est une expérience de lecture assez unique, qui nous demande une petite gymnastique pour en saisir toute les subtilités. Et ça vaut le coup !

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Editions Rannou

 

 

 

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