Rire contre le racisme est un ouvrage collectif comme je les affectionne (un cadeau reçu lors d’un ‘petit noël entre amis’). Une belle brochette d’auteurs réunis autour d’un thème fédérateur, qui nécessite de se mobiliser… Rire contre le racisme, une déclaration d’intention ! Car l’humour demeure une arme redoutable pour lutter contre la connerie.
Margerin nous propose d’inverser les rôles, en se mettant dans la peau un français de souche qui subit toutes les discriminations quotidiennes (au travail, face à la police…) que vivent en général les personnes qui portent sur eux leur différence.
Florence Cestac nous raconte avec sa tendresse habituelle une joute verbale entre deux ados amis qui se termine par la défaite de l’un, lorsqu’il dérape et sort une vanne raciste.
Rias Sattouf se remémore les réflexions racistes (venant de tous horizons) qu’il a pu entendre depuis sa jeunesse. Ce racisme quotidien et inconscient qu’il est plus que nécessaire de dénoncer et ne pas banaliser.
Rico aborde le thème de la discrimination positive dans le milieu professionnel, ses limites et ses absurdités, en particulier quand son personnage, d’origine africaine, doit collaborer avec un blanc daltonien.
Binet nous emmène en classe de découverte avec des élèves de primaire. On y découvre surtout que la connerie se transmet très facilement de pères en fils. Heureusement que l’amitié est là pour contrecarrer tout ça !
Le texte ‘Xénophobie’ de Raymond Devos devrait être lu dans toutes les écoles de France et de Navarre. D’autant plus quand il est illustré par Moebius.
Avec deux dessins et une planche, Kichka nous amuse tout en balançant des vérités qu’il est bon d’entendre souvent (en particulier les stéréotypes véhiculés par les contes de fées).
Cabu fait appel à son beauf moustachu et facho pour dénoncer les difficultés d’intégration d’un jeune d’origine maghrébine ou les abus du travail clandestin.
En un dessin, Maïtena en dit long sur le racisme ambiant chez les bobos et corrobore l’idée que racisme et jalousie sont intimement liés.
Fab & Aurel illustrent une mésaventure de Toufik, le personnage d’Elie Semoun qui, après avoir subit la discrimination d’un videur de boite de nuit, se confronte à son propre racisme.
Jean-Philippe Peyraud adapte un sketch du génial Alex Metayer, ‘Hymne à la joie’, dans lequel un père de famille exprime à ses enfants sa fascination pour les allemands. Cependant, entre fascination et fascisme, il n’y a qu’un pas que la connerie franchit allègrement.
Luis Rego et Willem nous raconte ‘la journée d’un fasciste’ et éprouvent presque de la compassion pour ce petit être plus fragile qu’il n’y parait. Il n’est en effet pas si facile que cela de vivre son fascisme en toute tranquillité.
Lionel Koechlin met en scène un chien et un chat qui prennent conscience de la stupidité de leurs réflexions racistes.
Didge et Van Linthout mettent en image un sketch de Chevalier et Laspalès qui dénoncent par l’absurde, en accumulant les clichés racistes que l’on entend malheureusement trop souvent dans la rue ou au café.
Alex Metayer encore, adapté cette fois par le non moins génial Alfred. ‘Mohamed apprend le français’, ou du moins il essaye. Mais ce n’est pas facile de maitriser toutes les subtilités de la langue de Racine…
Jul nous apprend que le racisme ordinaire sévis également dans le monde de la bande dessinée.
Quelle joie (jusqu’au cou !) de retrouver le trait magique d’Alexis, associé aux mots de son ami Gotlib. Ces deux gai-lurons ont trouvé une solution qui, si elle ne nous débarrasse pas du racisme de manière radicale, a le mérite de supprimer la souffrance de ceux qui en sont sujets…
Eric Cartier et Pierre Palmade aborde le racisme bourgeois qui accumule les clichés et les stéréotypes. Le personnage principal n’est pas raciste, puisque son ‘meilleur ami’ est maghrébin. Enfin, il ne sort pas tout le temps avec lui non-plus. Pourtant, il dit parfois des choses intelligentes…
Emmanuel Guibert illustre admirablement un texte de René Goscinny (‘Je ne suis pas raciste, mais…’) dans lequel ce dernier dresse une liste des « formules sournoisement amicales » utilisées par des ‘racistes prudents’…
En un dessin, Pétillon en dit long sur les désillusions des jeunes des cités.
Plantu lui, nous parle du décalage vécu par les jeunes issus de l’immigration, entre le discours d’un professeur et la réalité policière.
Zou adapte un texte de Michel Boujenah, qui nous raconte la vie tourmentée d’un enfant juif-arabe…
Cet album se referme sur une réflexion pertinemment absurde du chat de Geluck.
Rire contre le racisme est avant tout un spectacle comique (qui en est à sa 8ème édition). C’est pourquoi on retrouve des adaptations en bd de sketch écrits pour la scène. C’est d’ailleurs le point faible de cet album. Ces adaptations ne sont pas convaincantes. Ce n’est pas un exercice facile et seul Alfred s’en sort haut la main. Les éditions Jungle sont spécialisées dans ce genre d’ouvrages qui, il faut bien le dire, sont pour la plupart très mauvais (en particulier celui sur Desproges !). Celui-ci est tout de même bien meilleur, grâce à la présence de grands auteurs et dessinateurs de bande dessinée, qui relèvent le niveau.
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