La peur du rouge – Fred Neidhardt (Delcourt Shampooing, 2010)

La peur du rouge - Fred Neidhardt (Delcourt Shampooing, 2010) dans Chroniques BD 9782756020839fs

Fred Neidhardt (que je connais par sa série Mr Tue-Tout dans le Psiko, ou pour ses impostures loufdingues dans l’Echo des savanes) nous raconte son voyage scolaire organisé à Berlin en 1981. Ville de tous les contrastes, Berlin Est est une ville de façade, sous le joug de la répression stalinienne, où la misère se voit (et se vit) à chaque coin de rue. Berlin Ouest est la ville de la liberté, de l’opulence occidentale, des surplus militaires, des Marlboro et de la pornographie accessible.

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Le récit se divise également en deux parties. Dans la première, Fred nous raconte les relations puériles et impitoyables d’une bande de boutonneux pré-pubères qui s’amusent d’un rien (sauf lorsqu’ils visitent le « Mémorial de toutes les victimes du fascisme et du militarisme »), obnubilés par la déconnade, le flirt et la masturbation… Le récit bascule ensuite dans le tragique, lorsque Fred décide de faire le mur et partir seul dans Berlin Ouest, à la recherche de Christiane F, afin de la sortir de sa misère. Car dans son livre, Fred y a vu un signe du destin : la première fois qu’elle s’est défoncée à l’héro, c’était le jour même de son dixième anniversaire. Cette errance sur les traces de son « héroine » l’amènera dans le quartier des drogués et des prostitués, dans lequel il sera à deux doigts de se faire agresser. Heureusement qu’une bonne âme lui vient en aide. Suite à cette rencontre, Fred vivra sa première expérience sexuelle, mais pas du tout comme il l’avait imaginé…

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Cette deuxième partie rend plutôt mal à l’aise. On se dit que Fred aurait pu garder cela pour lui. Mais en fait, il parait après coup normal, dans la logique du récit, qu’il aborde cet épisode plutôt traumatisant. Ce périple en « terre rouge » aura été une sorte de rite de passage, marquant pour lui la fin de l’innocence infantile, pour entrer de plein pied dans l’univers impitoyable des adultes. Un monde où la réalité bouffe littéralement l’insouciance et les illusions de la jeunesse. Si la « peur du rouge » sous entend la peur du communisme (tel que peut l’imaginer un jeune pré-ado dans le contexte de la guerre froide), cela peut également être interprété comme la peur du Désir, de la sexualité génitale.

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Neidhardt sait parfaitement retranscrire cette atmosphère fin 70-début 80 (voir son Pattes d’eph et col roulé) en usant judicieusement de références vestimentaires et culturelles de l’époque. Bien qu’un peu plus jeune que lui, j’ai également vécu mon enfance durant cette période. Aussi, je ne peux m’empêcher de voir en son style animalier un clin d’œil aux bandes dessinées de Pif gadget, le journal « coco » pour la jeunesse (avec certes, un trait plus expressif et un sens du détail plutôt réaliste au niveau des décors). Ce choix est cependant judicieux pour ne pas sombrer dans le pathétique et garder une distance humoristique salutaire vis-à-vis de cette deuxième partie du récit plutôt glauque. Au final, La peur du rouge est un album sensible, juste et sans concessions, que ne regretteront pas d’avoir lu ceux qui auront été jusqu’au bout… A ranger aux cotés de Pourquoi j’ai tué pierre ou Les pilules bleues.

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