En une petite vingtaine d’albums sur quinze ans, Frederik Peeters est devenu un des auteurs les plus intéressants de sa génération. Un auteur complet (dessinateur, scénariste, coloriste…) qui développe un univers pictural des plus singuliers, mille fois copié… A l’aise dans de nombreux registre (fantastique, autobiographique, polar, dramatique ou fantaisiste), il sait adapter son graphisme (qui évolue au fil des productions) aux besoins de ses projets.
Pilules bleues fait parti de ces quelques bande dessinées qui ont fait grandir le médium, l’emmenant vers des territoires qui ne semblait pas le concerner (récit dramatique à la première personne, abordant des thèmes de société …). On pourrait le définir comme un roman graphique car c’est un récit long, autobiographique et réalisé en noir et blanc. Mais ce n’est pas suffisant pour le qualifier ainsi. Pour moi, Pilules bleues est une bande dessinée des plus traditionnelle : les séquences sont fluides, clairement enchainées, même si Peeters use parfois d’ellipses et de cadrages décalés. Ses dessins ne sont pas qu’illustrations, ils évoquent parfois ses divagations mentales (avec la présence pachydermique de rhinocéros et de mammouths). Son style semi-réaliste et sa maitrise du noir et blanc contrasté apportent une légèreté qui convient à merveille pour « dédramatiser » le récit.
Raconter la maladie n’est jamais évident, surtout par le biais d’un médium qui n’a que rarement permit d’aborder ce genre de thématique. Pilules bleues est un album sensible, qui aborde un thème grave (le sida), sans jamais sombrer dans le pathos. La mort est à peine évoquée, seule la peur de la contamination préoccupe le couple. Un récit émouvant qui prône l’espoir, la victoire de la vie sur la maladie. Peeters a fait le choix de nous raconter son histoire par le petit bout de la lorgnette, privilégiant la subjectivité de son point de vue. Il croit en son récit, et nous aussi pour le coup (j’avoue avoir eu quelques aprioris sur cette Bd qui se sont vite dissipés… Un bien bel album.
Tout à fait d’accord avec cette critique, ma foi fort bien tournée monsieur Mitchul !
Dernière publication sur carnet à dessins : Une séance
et moi aussi je ne peux qu’approuver tes dires. Sur le graphisme qui évolue et se bonifie d’album en album, on en a encore la preuve sur « Château de Sable »
Je n’ai pas encore lu “Château de Sable”, mais ça ne saurait tarder…
Outre son graphisme, c’est pour moi surtout sa grande qualité d’écriture qui fait que Peeters est capable de changer de thème. Ce type est vraiment un auteur complet. C’est un raconteur d’histoire hors pair.
Non, non je ne suis pas fan !
En tout cas, superbe chronique !
Merci David ! Ce n’est pas facile de trouver des mots justes et concis pour décrire cette oeuvre qui ma foi, ne m’a vraiment pas déçu (comme je le dis, j’avais beaucoup d’aprioris, comme souvent avec les albums unanimement salués).
C’est le deuxième que je découvre de Peeters (après Constellation)… Un auteur à suivre, c’est clair !