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Archives pour octobre 2010

Les visiteurs du soir – Anne Wiazemsky & Stanislas Bouvier (Desclée de Brouwer, 2003)

Les visiteurs du soir - Anne Wiazemsky & Stanislas Bouvier (Desclée de Brouwer, 2003) lesvisiteursdusoircouv

Je découvre Stanislas Bouvier grâce à ce récit illustré. Peintre et illustrateur, il est, entre autres, l’affichiste officiel du Théâtre de la Commune, du Festival International du Film de la Rochelle ou du Printemps des Poètes… Son univers pictural se situe entre la classe absurde d’un Magritte et les déformations corporelles d’un Topor. Cependant, le surréalisme de Bouvier (emprunt d’un subtil humour noir) n’est jamais outrancier, ni trop fantastique, ni trop délirant. Il se situe toujours à la frontière. C’est ce qu’on peut constater à la lecture de ces « Visiteurs du Soir ». A chaque page, on croit basculer dans le fantastique ou le tragique, mais on demeure dans une ambiance paisible, légèrement intrigante, mais jamais angoissante.

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Cette limite fait échos à celle du récit d’Anne Wiazemsky. Un récit qui a pour thème central l’absence. Les parents qui sortent en ville, la baby-sitter qui en profite pour aller au bal. La visite inopinée des grands parents qui, de par leur présence impromptue, renvoient à leurs absences répétés. Une subtile évocation du manque, dont les enfants ne semblent pas souffrir. Au contraire, ils sont heureux de cette situation.

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« Mais qui marche à cette heure, entre chien et loup, sur le gravier de la maison, au bord du lac, en Suisse ? Joyeuse et vraie, l’histoire d’une visite inattendue, des enfants en pyjama, des grands-parents en tenue de gala, un pays rêvé, un hérisson apprivoisé, une jeune femme enjouée, la rencontre des deux mondes où chacun a sa façon d’aimer. »

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Les toiles de Bouvier illustrent admirablement ce sentiment. Il sait dépeindre des ambiances fantomatiques, en ne représentant que les silhouettes des personnages, les décors vides (intérieurs et extérieurs). Les quelques portraits qu’il dresse (des grands parents ou de la baby-sitter) sont troubles. Des formes vagues, évanescentes… Ses couleurs (fondus de tons gris, ocres ou bleus) sont sombres, mais chaleureuses, boisées. Elles renforcent cette impression de mystère qui plane tout au long de cette histoire. Les tableaux de Bouvier représentent plus les sentiments des jeunes enfants qu’ils ne décrivent les événements (voire comment ils s’imaginent le voyage en Suède de leurs grands parents). Un bien bel ouvrage.

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Illustrations de Stanislas Bouvier

Stanislas Bouvier sur Google images

Kramix – Revue (Le Lombard, 2010)

Kramix - Revue (Le Lombard, 2010) dans Presse et Revues kramix5

Numéro 5, couverture de Nix

Après Le Strip, les éditions du Lombard (qui ont surement compris l’intérêt de prolonger leur expérience éditoriale) ont sorti en janvier de cette année (lors d’Angoulême) cette nouvelle revue, également vendue en librairie spécialisé. On retrouve certains mêmes dessinateurs (Coyote, Nix, Mo/cdm, Clarke…) ainsi qu’Antoine Morel et sa chronique « la vodka du diable ». Mais autant Le Strip (qui ne parait plus) ne contenait que des auteurs connus et reconnus, Kramix nous présente des dessinateurs(trices) possédant moins de visibilité médiatique, mais non moins de talents (Ptoma, Soulcié, B-gnet, Camille, Maud Millecamps, Lucile Gomez, Jürg…). Ce qui est plus intelligent et répond plus justement à une politique de diffusion d’auteurs moins évidents (moins confirmés à la vente) pour ainsi assurer la relève.

C’est donc dans ses intentions, mais également au niveau du format et d’une partie du contenu que des changements s’opèrent (sans oublier le prix, même si 2 euros, ça reste compétitif). On y trouve plus de rédactionnel, d’articles, et même une nouvelle illustrée. Au final, cette nouvelle revue reste un outil de promotion pour les éditions du Lombard (mais bien moins que ne l’était Le Strip) qui y diffusent toujours en grande partie, des auteurs maisons. Perso, je trouve Kramix plus intéressant, plus abouti, et bien plus adulte que Le Strip (la nouvelle de Nicolas Ancion n’est vraiment pas politiquement correcte !). Le nom Kramix sonne comme un croisement entre « crade » et « comix ». Pas étonnant alors que ce « kramix » aborde le thème des Punks dans ce dernier numéro (5) de septembre. Malgré les apparences, Kramix est d’un esprit plus proche de Fluide Glacial (voire du Psikopat) que de Spirou. A suivre donc…

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Numéro 2, couverture de Clarke

Midnight Movies – From the Margin to the Mainstream (Stuart Samuels, 2005)

 

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Midnight Movies est un passionnant documentaire faisant la lumière sur un phénomène plutôt obscure mais ô combien fondamental de la culture américaine. Un reportage dans lequel tous les protagonistes (Jodorowsky, Romero, Waters, Lynch…) reviennent sur cette formidable aventure contre-culturelle des années 70. Tout commence au ELGIN Theater de New York à l’automne de l’année 1970, quand le patron du cinéma, Ben Barenholtz, décide d’ouvrir une séance à minuit afin de passer un film que personne n’a encore osé diffuser (si ce n’est le MoMA) et qu’il est impossible de projeter à une heure normale. Un film de cowboy trop expérimental et mystique pour attirer les fans de John Ford ou même ceux de Sergio Leone. El Topo restera plusieurs années à l’affiche, attirant de plus en plus de fanatiques (artistes et hippies de toutes sortes), par un effet de bouche à oreille des plus efficaces. C’est rapidement plus de 600 personnes par soir ! Un mythe est né. Les séances de minuit ont depuis pullulé un peu partout, et existent encore aujourd’hui.

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El Topo d’Alejandro Jodorowsky (1970)

 

Ces Midnight Movies (ou Midnite) sont rapidement devenus de véritables emblèmes de la contre-culture des années 70. Six films qui n’ont absolument rien en commun (entre un western métaphysique, un classique du cinéma d’horreur, une comédie musicale, un film de rasta, une comédie trash et un film expérimental) si ce n’est de réunir à chaque séance de plus en plus de monde, jusqu’à l’hystérie. Le sommet est atteint avec le Rocky Horror Picture Show quand rapidement, le spectacle n’avait plus lieu sur l’écran, mais dans la salle où le public déguisé, rejouait les scènes du film.

Ce reportage nous présente donc ces films de manière chronologique, par ordre de diffusion. Il ne faut cependant pas oublier d’autres œuvres cultes qui ont fait les grandes heures de ces séances nocturnes : The Wall d’Alan Parker et Pink Floyd, Freaks de Tod Browning, Harold et Maude de Hal Ashby ou Reefer Madness, film de propagande anti-marijuana. Sans oublier de nombreux cours métrages diffusés en première partie. Le tout projeté dans une ambiance plutôt enfumée…

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The Rocky Horror Picture Show de Jim Sharman (1975)

 

« Un documentaire original qui explore le parcours de six films cultes des années soixante-dix. Entre 1970 et 1977, ces six films à petit budget, montrés aux séances de minuit, ont influencé la manière de faire et de voir les films, ils ont réinventé le médium en dépassant les frontières du mauvais goût et des tabous sociaux. Assister aux « films de minuit » est devenu un marqueur social, intellectuel, cinéphilique et culturel, un rite de passage pour toute une jeune génération en crise. » (allociné)

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La Nuit des morts vivants de George A. Romero (1968)

Avec El Topo (1970), Jodorowsky revisite le western spaghetti en poussant le genre dans ses retranchements, tant au niveau de la représentation de la violence (le gore, il aime ça !) que du rythme de narration (une sorte de road-movie shakespearien). Maitre du symbolisme, Jodo use de scènes et d’images archétypales, puisées dans notre inconscient collectif…

Night of the Living Dead (1968) marque un tournant dans l’histoire du cinéma. Un film à mi-chemin entre le cinéma d’horreur classique (huis-clos en noir et blanc, scènes de dialogue assez « théâtrales »…) et ce que sera le cinéma gore quelques années plus tard (ah, la scène choc du festin cannibale !). Un traitement réaliste, quasi documentaire, renforcé par l’utilisation du noir et blanc et la présence d’images télévisuelles. Un nihilisme total, des images chocs, une fin loin de toute moralité, Night of the Living Dead est un film matriciel, qui influence encore bon nombre de cinéastes plus de 40 ans après sa sortie.

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Pink Flamingos de John Waters (1972)

Pink Flamingos (1972) est le chef-d’œuvre du mauvais gout assumé. John Waters est un esthète du trash. Une famille recomposée (ou plutôt décomposée) se dispute avec ses voisins le titre de la famille la plus dégoutante de la planète. Le film accumule les scènes trash cultes, dont le summum est atteint lorsque Divine, l’héroïne, avale devant nous une déjection canine fraichement démoulée. Un film qui marque à jamais.

The Harder They Come (1972) est le seul que je ne connais pas vraiment. J’ai du l’entrevoir une fois lors d’une diffusion sur Arte, il y a longtemps. Je ne me rappelle donc que très très vaguement cette histoire d’un chanteur (interprété par Jimmy Cliff) issu de la campagne, voulant faire carrière à la ville (Kingston) mais qui deviendra un hors-la-loi. Ce film a surtout marqué pour son engagement, son dépaysement (le cinéma jamaïcain était peu connu à l’époque. Encore maintenant d’ailleurs) et sa bande-son reggae.

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The Harder They Come de Perry Henzell (1972)

The Rocky Horror Picture Show (1975). J’avoue ne pas aimer ce film. Je ne supporte pas les comédies musicales, aussi rock et déjantée soient-elles. Je reconnais cependant que ce film (adaptation du spectacle du même nom) mérite son statut d’œuvre subversive (parler de transexualité à l’époque était un sacré tabou !) et donc libératrice pour bon nombre de marginaux…

Eraserhead (1977) est un ovni. Une expérience sensitive et émotive intense, plutôt qu’un délire intello. Une esthétique industrielle, renforcé par une bande son hallucinante. Lynch ne nous raconte pas une histoire linéaire, mais nous confronte à une succession de séquence qui nous plonge dans un univers onirique, insensé, où les têtes tombent et les fœtus portent des costards… Un trip indéfinissable.

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Eraserhead de David Lynch (1977)

Ce documentaire est un indispensable témoignage sur une époque maintenant révolue, où le cinéma authentique et sans concessions, subversif et déviant, existait grâce à la volonté de quelques artistes et programmateurs indépendants, et n’était pas encore récupéré par les industriels du spectacle filmique.

Midnight Movies sur Cinétrange.com

Meurtres et Chatiments – Carlos Nine (L’echo des savanes/Albin Michel, 1991)

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Les dessins de Carlos Nine nous donne une petite idée de ce que produirait un croisement contre nature entre les délires visuels d’un Tex Avery et l’univers Dantesque d’un Jérôme Bosch. Le tout situé dans une ambiance Polar année 50… Une vraie cour des miracles, qui nous rappelle le Freaks de Tod Browning. Une succession de personnages monstrueux, exécutés avec une finesse et une sensibilité plastique qui contraste fortement avec les sujets et les thèmes abordés. Ses difformités en arrivent à dégager assez de sensualité (par un subtil travail des couleurs réalisé par l’auteur lui même) pour devenir supportables, attirantes, fascinantes…

Je cite le texte de FredGri, tiré du très bon site sceneario.com, qui a su trouver les mots justes pour commenter cette œuvre hors-normes : « Parker, Pirker et Babously sont trois détectives habitués aux affaires de famille. Retrouver une fille fugueuse, une femme infidèle c’est leur quotidien. Mais dans ce monde très bizarre le moindre suspect prend des figures de héros de dessins animés et les fantasmes prennent de droles de visages. Nos trois détectives vont alors devoir plonger en plein délire toonesque. »

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« Le monde de Carlos Nine est tout de suite très particulier.
Tout d’abord son sens de la narration est complètement décalé, il oblige le lecteur à se laisser mener par le bout du nez dans ces pages complètement hallucinantes, il n’y a pas de cases à proprement dit, parfois meme il illustre littéralement telle ou telle expression. C’est un voyage dans un monde qui se balance entre le non-sens, les polars et les références aux dessins animés de notre enfance, le tout avec une pointe de cruauté.
Mais ce qui est le plus poignant, le plus envoutant c’est la richesse et la beauté du graphisme de Nine. Ici tout, ou presque, est expérimentation au service d’un nouveau langage plus ludique, plus fou. Les personnages et les objets se déforment, on flotte dans l’aquarelle la plus pur puis on passe de temps à autre à du crayon. Là, plus de références figuratives, plus de repère, dans ce chef d’œuvre passé complètement inaperçu (Nine explique qu’en fait les libraire ne savaient pas ou le ranger, du coup il s’est vite retrouvé dans les bacs des soldeurs) nous rencontrons un artiste explorateur anti conventionnel !
Bien évidemment cet album demande aux lecteurs de jouer le jeu, mais là aucune démarche intellectuelle, aucune prétention de cracher sur le passé, non juste un auteur qui s’amuse, c’est un plaisir à chaque page, une vraie explosion graphique. C’est en tout cas avec cet album que j’ai découvert une école plus personnelle d’artiste, ce Sud-Américain n’a pas fini de faire parler de lui, soyez en sur !
Alors surveillez bien vos bouquinistes, ca en vaut le coup.
 » (FredGri, avril 2003)

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Entre rééditions et créations, Nine est toujours prolifique. Voir sur son site carlosnine.com/

Carlos Nine sur bedetheque et sur Stuart Ng Books

Histoires Ordinaires – Binet (Fluide Glacial, 1979)

Histoires Ordinaires - Binet (Fluide Glacial, 1979) dans Chroniques BD bidochon0047830

Il est des œuvres qui marquent à vie. Se faire offrir cet album de Binet quand on est à un âge où son univers bédéphilique se limite à Tintin, Gaston et Pif gadget, ça laisse des traces… L’ami qui m’a fait ce présent m’annonçait à cette occasion que j’allais découvrir autre chose que ce que j’avais pu lire jusqu’alors… La découverte du monde adulte se fait par plusieurs étapes successives. Il est clair que je venais d’en franchir une…

Comment ne pas être interpellé, intrigué par ces histoires d’inceste, de sexualité, de libération de la femme, de problème de couple, d’homosexualité, de conflit de voisinage… Bref des préoccupations d’adultes, aux antipodes de celles qui étaient les miennes alors (j’avais douze ans à peine)… Histoires Ordinaires est paru à une époque où les institutions sociales étaient bousculés : le travail, la famille, la justice, les bonnes mœurs… Tous ce que cette jeunesse de Mai à voulu (et contribué parfois) à changer : les droits des femmes et des enfants, la parité homme-femme, le droit de vivre autrement…

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Dans ce troisième album (après Kador et Poupon la Peste), recueil d’histoires pré-publiées dans Fluide Glacial, Binet possède déjà toute sa maitrise graphique, s’appuyant sur ces formes arrondies mais très expressives, qui rendent parfaitement la laideur, voire la monstruosité, de ses personnages. Une laideur physique et intérieure qui n’en demeure pas moins humaine. Car Binet est un observateur imparable des comportements de ses contemporains, dans ce qu’ils ont de moins flatteurs.

Cette absence de décors (dont il s’amuse dans le premier album des Bidochons) permet à notre œil de ne pas se distraire et d’aller à l’essentiel : les personnages et les dialogues. Une sorte de théâtre en bd où le lieu est à chaque fois unique et les plans souvent fixes (tout se joue au niveau du dynamisme des attitudes et des mouvements). La séquence est temporelle plutôt que spatiale.

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L’histoire de « Bertrand (ou les absents ont toujours tort) » nous rappelle que l’égalité de la justice est une belle utopie. « Adèle ou : on m’a pas bien expliqué » démontre que la libération de la femme n’est pas encore gagnée.  « Marthe et Richard ou : jamais seuls avec HLM » est en fait la première mouture des Bidochons. La « beaufitude » et les problèmes relationnels sont déjà bien présents. Un coté salace en plus… L’histoire de Carole apporte une réponse à la question : « qu’est-ce qu’on peut faire quand on est une petite fille et qu’on s’emmerde le mercredi » ? « GetM », jolie jeu de lettres pour signifier les initiales des deux personnages (Georges ? et Michel) et ce qu’ils ressentent l’un pour l’autre… « Vieux fou vieux con » est un petit bijou. Les protagonistes de cette histoire de voisinage ne sont pas les personnes, mais leur maison, qui dialoguent entre elles.  Le jeu des ombres est remarquable. « Jojo » raconte une rencontre organisée par petite annonce, où les rapports hommes-femmes sont inversés.  La dernière histoire : « Guignol et Kirsch » nous rappelle qu’il n’est pas simple d’éduquer nos chères têtes blondes, sans parfois pêter un plomb… Ces histoires furent écrites dans les années 70 mais, (mal)heureusement pour nous, elles demeurent d’une modernité folle.

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Lire les albums de Binet n’est pas sans conséquence pour notre amour-propre car on en prend à chaque fois pour notre grade. Il bouscule les parties basses de nos instincts. Surtout avec ces « Histoires Ordinaires », qu’il aurait aussi bien pu intituler « Contes Cruels ». Mais avec le temps (du Kador à Poupon la peste, en passant par M le Ministre, sans oublier les Bidochons), Binet semble faire preuve de plus de compassion avec l’espèce humaine, de moins de cruauté. Alors qu’on ne le mérite pas !

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Binet sur bedetheque

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