Archives pour mai 2010

Le manchot de la butte rouge (la vie de Victor Levallois) – Stanislas & Rullier (Les Humanoïdes Associés, 2003)

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Je connais Stanislas de référence depuis longtemps, en tant que membre fondateur de l’Association. J’ai déjà croisé son trait dans certaines revues de bandes dessinées ou d’illustrations. Mais j’avoue n’avoir jamais lu un de ses albums avant celui-ci. Il est des noms comme ça qu’on entend depuis longtemps mais qu’on ne connais pas vraiment. Même si ce Victor Levallois n’est pas forcement représentatif de sa production au sein de l’Association, il n’en demeure pas moins son héros phare, créé au début des années 90.

Stanislas nous raconte : « L’idée toute simple de Laurent, est de raconter la vie d’un petit bonhomme de cette fin de 20° siècle : de la dernière guerre à aujourd’hui. Il y a des multitudes d’histoires à raconter. Victor serait tantôt acteur, tantôt témoin d’événements plus ou moins historiques ou même quotidiens.
Avec ces deux premiers albums, il a donc connu la Guerre d’Indochine avec le troisième : la reconstruction industrielle de l’après-guerre. Puis, par exemple, la guerre d’Algérie, le mur de Berlin, un tournage de péplum à Cinecitta, le Swinging London, etc, etc. Mais le plus important dans cette bande dessinée, c’est sa modernité malgré une apparence classique. Victor, est un personnage fondamentalement humain. Il vit des histoires d’amour, il a des problèmes de fric, il peut rencontrer des méchants sympathiques et des gentils antipathiques. »
(PLG n°34, 1998)

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C’est avec un grand plaisir que je me suis plongé dans cet album de facture classique, aussi bien par son format que son style et sa narration. Le manchot de la butte rouge est un album qui s’inscrit dans la tradition des aventures de Tintin, Gil Jourdain, Spirou ou autre Ginger (de Jidéhem) : un héros intègre et hors de tous soupçons (quoique), une ambiance année 50, une enquête policière dans un contexte politique… Stanislas rend son tribu à ce genre de « BD à papa ». Une certaine esthétique de la ligne claire (ce n’est pas anodin s’il a produit Les aventures d’Hergé !), qu’il partage avec bon nombre de ses contemporains, Floch’, Dupuy et Berberian , Joost Swarte, Serge Clerc et autres Yves Chaland… Une lisibilité presqu’infantile, au service d’une histoire aux préoccupations adultes (pas de manichéisme, les personnages sont anbigus).

Février 1951. Retour à la case départ pour Victor Levallois. A 24 ans, le voilà seul, fauché, insomniaque, et obligé d’accepter un boulot de gardien de nuit dans une société d’aéronautique. Sans doute ignore-t-il qu’en ces temps de Guerre Froide, les soldats de l’ombre ont fait de ces bureaux d’études de nouveaux champs de bataille. (4ème de couv’)
Bien que n’ayant pas lu les premiers épisodes de la série (Trafic en Indochine et La route de Cao Bang), je suis rentré pleinement dans cette aventure, qui me donne bien envie de découvrir ces deux premiers, ainsi que le dernier (La ballade des clampins), sorti en 2004.

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Interview de Stanislas sur PLG

Stanislas sur Bedetheque

Kinky & Cosy (Avec ou sans, ça dépend) – Nix (Lombard, 2007)

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Nix est un dessinateur qui a rapidement connu le succès avec cette série. Considéré comme « le plus jeune rejeton des dessinateurs de presse flamande », on découvre en France ses dessins dans Ferraille Illustré, Spirou ou Le Strip. Le jury de la Quinzaine de la BD 2007 (Bruxelles) lui a décerné le Prix Petit Spirou pour ce 3e album de la série Kinky & Cosy, « Avec ou sans, ça dépend », éditée au Lombard dans la collection Troisième Degré. On ressent l’influence de ses ainés flamands sur son humour loufoque, décalé, absurde, limite trash-scato et plutôt engagé politiquement. Un humour qui dénonce, en somme. Confirmé par la présence de parents indignes, de scientifiques fous, de policiers demeurés, de curés cons, de politiciens corrompus, de professeurs fêlés ou de réfugiés espions. Sans oublier quelques extra-terrestres…

Tout au long de l’album, Nix alterne entre des gags en strips de trois cases, et des histoires plus longues en planche « type gaufrier ». Il n’y a pas de personnages principaux. On peut suivre les aventures des jumelles (Kinky et Cosy donc) mais aussi celles de ses parents, de Mr Trillion le politicien, du docteur scalpel… Une BD chorale, ou les histoires se croisent et les protagonistes se rencontrent régulièrement. Au niveau de son style, Nix me fait penser aux série animées made in US plutôt trash. Entre les rondeurs colorés des Simpson ou de American Dad et le trait underground de Mike Judge, le papa de Beavies & Butt-head. C’est con, très con. J’adore…

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HERGE (2ème partie) – Pierre Assouline (Folio Gallimard, 1998)

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Je referme cette riche biographie avec le sentiment d’avoir enfin découvert Hergé. Un homme avec ses qualités (patient, candide, affable, modeste, fidèle en amitié…) et ses défauts (orgueilleux, égocentrique, puritain, colérique, fuyant les conflits, maniaque…). Un personnage ambigu dans ses relations aux autres mais pourtant très clair vis à vis de lui même. Un angoissé, qui dans le fond n’aura qu’une obsession, atteindre la sagesse et la pleinitude. Il deviendra au fil du temps un érudit en matière de philosophie orientale (le Taoisme en particulier), d’ésotérisme et de parapsychologie (grâce à sa rencontre avec Jacques Bergier, co-auteur du livre Le Matin des Magiciens, et de la revue Planète). Un artiste qui tentera d’autres expériences (la peinture, le cinéma en cherchant à adapter Tintin…) mais qui reviendra toujours à la bande dessinée, car en bon perfectionniste qui se respecte, il se rend compte que c’est véritablement dans ce domaine qu’il excèle.

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 Hergé par Jacobs

J’ai appris également qu’Hergé n’était pas un dessinateur isolé dans une tour d’ivoire, mais un amateur éclairé qui; à la fin de sa vie, s’intéresse grandement à ce qui se fait dans la bande dessinée moderne. Il est très ouvert d’esprit et apprécie à leur juste valeur les productions de la nouvelle génération, des auteurs qui se situent pourtant aux antipodes de son oeuvre. Pierre Assouline nous raconte : « Il tiens Sempé pour le La Bruyère du XXème siècle, et sous la plume de cet honnête homme, il n’est pas de plus beau compliment. Les planches des Frustrés de Claire Bretécher sont d’une férocité et d’un pathétique qui l’enchantent et lui procurent un vrai bonheur de lecture, qu’il s’agissent des dessins ou des dialogues. En dehors d’hommes comme Jacobs, Cuvelier, Schulz ou Johnny Hart, qu’il considère déjà comme des classiques ,Hergé loue volontierles qualités d’artistes tels que Jean Giraud dit Gir dit Moebius, Hermann, Gébé (« qui n’a que du talent »), Franquin (« prodigieux dessinateur »), Gotlib ou Raymond Macherot, le créateur d’Anthracite et de Chlorophylle, qu’il juge l’égal de Walt Disney dans sa manière de camper le caractère des animaux. Il lit d’une traite Les Six Voyages de Lone Sloane, un héros auprès duquel Tintin lui paraît excessivement bourgeois et raisonnable. Son auteur Philippe Druillet est un des rares, selon lui, à donner une dimension nouvelle à la BD, plus proche de l’onirisme que du fantastique. Il se délecte de ses grandes images « à la fois précises, minutieuses et fulgurantes où tout fuse et explose dans une sorte de délire graphique ». Quant à Jean-Claude Mézières, qu’il peut se flatter d’avoir repéré dès l’âge de 15 ans, Hergé se dit impressionné par se capacité d’invention et sa puissance de composition. Après avoir lu L’Ambassadeur des ombres, les Oiseaux du maitre, Le pays sans étoiles ou l’Empire des mille plamètes, il va même jusqu’à évoquer Jérôme Bosch et Gustave Doré, c’est dire !

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Tintin par Moebius

Mais à ses yeux, Fred, pilier de Pilote où il dessine Philémon et scénarise Timoléon, demeure largement au-dessus du lot. Pour sa faculté à se dégager de l’influence américaine. Pour la dimension poétique et la lisibilité de son dessin. Pour son irrespect à l’endroit des institutions. Pour sa faculté de faire croire à l’incroyable. Et pour ce mélange de surréalisme, de loufoque, d’inquiétude, d’absurde, de logique qui n’appartiennent qu’à lui.
Pour être ouvert à la culture d’une autre génération de dessinateurs, Hergé n’est pas pour autant prêt à accepter n’importe quoi. Ni jeuniste, ni démagogue, il met un frein à ses enthousiasmes. Peu lui chaut de passer pour conservateur. Il distinguera toujours les créateurs des fabriquants. Et les artistes du reste des fournisseurs. En fait, seuls la vulgarité, la confusion et le travail bâclé le choquent vraiment. Ainsi, en découvrant un paquet de bandes dessinées underground expédié d’Amsterdam, il ne le récuse pas globalement. Il apprécie les dessins de Robert Crumb et parvient même à trouver « intéressantes » les bandes les plus pornographiques tant leur agressivité, leur bonne humeur et leur exagérations les rendent finalement comiques ».
Ces attraits pour les auteurs modernes nous en apprend bien plus sur lui, sa personnalité, son ouverture d’esprit… Bien plus qu’une enième analyse.

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Hommage de Tibet

Chroniques Frénétiques (Une histoire intime du rock) – Patrick Bénard (2007)

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Version auto-produite

Patrick Bérnard (lauréat du concourt Manuscrit Technikart 2006) nous raconte son histoire intime du rock, chroniquant les albums qui ont balisés sa vie. Enfin, pas que la sienne. En fait, ce livre nous narre les délires schizophréniques de l’auteur qui, s’il parle parfois en son nom, s’exprime souvent par le biais de ses avatars, Hadrien et Werther Donner.

Je suppose que ces derniers vivent des choses que Patrick a réellement vécu, mais surtout fantasmé. « Histoire intime du rock » car tout ce qu’il vit au fil des pages fait écho à ce qu’il écoute (et diffuse, puisqu’il a longtemps été animateur radio). Les paroles des chansons résonnent avec les situations vécues par Hadrien et Werther : « La vie d’Hadrien se construit au fur et à mesure de l’évolution du rock. Et ce n’est pas lui faire injure que d’affirmer que la musique influença ses choix et contrôla son destin. »

« Découpée en trente-trois chapitres un tiers [dont chacun porte le titre d'un album], accompagnée d’une intro et d’un rappel, l’histoire se déroule sous forme de courtes chroniques musicales. Elle insiste parfois sur l’évolution d’un groupe, d’un album, d’une carrière, et mesure à la fois l’importance du rock dans la vie quotidienne et sa réelle influence sur le comportement de personnages ballottés au gré des événements du quotidien. Quand ce n’est pas l’Histoire avec un grand H qui s’en mêle.« 

Une manière originale de nous proposer des chroniques d’albums Rock cultes même si, en une petite quarantaine seulement, il en manque, c’est évident. Mais ne boudons pas notre plaisir, rock et littérature font encore une fois bon ménage.

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L’auteur avec la version « technikart »

Interview de Patrick Bénard

Playlist sur le blog d’Isatagada

Les Chefs-d’oeuvre de la bande dessinée (Anthologie Planète, 1967)

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Les chefs-d’oeuvre de la bande dessinée est une anthologie de près de 500 pages, la première du genre en France, créée à l’initiative de Jacques Bergier. Les textes et documents ont été assemblés et présentés par Jacques Sternberg, Michel Caen et Jacques Lob, sous la direction artistique de Pierre Chapelot. Richement illustrée, comprenant de nombreux livrets en couleurs, les textes de présentation sont par contre relativement sommaires. Et si on fait un tour rapide (en se rappelant que l’ouvrage date de 1967 !), il manque quand même quelques séries incontournables, telles que Andy Capp de Reg Smythe, Mafalda de Quino ou le Donald de Carl Barks…

L’intérêt de cette anthologie réside dans la diffusion de planches d’auteurs rares et pour la plupart maintenant introuvables. Des anciens, précurseur du genre (Doré, Wilhelm Busch, Rabier, Christophe, McCay, Caran d’Ache, Herriman…) à la nouvelle garde de l’époque (Forest, Druillet, Pellaert ,Giraud, sans oublier Astérix qui débutait sa carrière internationale), en passant par les classiques de l’age d’or US (Alex Raymond, Lee Falk, Flash Gordon, Mad Magazine, les EC Comics, DC Comics et autres Marvel…) et franco-belge (Forton, Hergé, St Ogan, Franquin, Morris…). Bref, Les chefs-d’oeuvre de la bande dessinée est un ouvrage qui cernent toutes les époques, tous les genres, mais se focalise sur l’Europe et les Etats Unis uniquement (le Manga était quasiment inconnu à l’époque).

Préfacée par René Goscinny (qui commence par :« Moi, j’ai toujours pensé qu’il était mauvais de commencer un texte par : « Moi, je », et qu’il ne fallait jamais accepter d’écrire des préfaces. »), cette anthologie est structurée en cinq parties, distinguant les types de personnages plutôt que les genres ou les styles de la bande dessinée : Les farceurs (du sapeur Camember aux Schtroumpfs), les surhommes (de Popeye à Spiderman), les héros (de Zig et Puce à Astérix), les animaux (de Felix le chat au Marsupilami) et les insolites (de Little Nemo à Jodelle).

Gotlib raconte dans « Ma vie en vrac » une anecdote à propos de la collaboration de Goscinny à cet ouvrage : « En 1967, les éditions Planète ont publié un gros bouquin intitulé Les Chefs d’oeuvre de la bande dessinée pour lequel une préface avait été demandée à Goscinny. A cette époque, il n’y avait que quatre grandes réunions des collaborateurs de Pilote, rue du Louvre, généralement pour préparer les numéros spéciaux pour les vacances, la Noël, etc. Lors de l’un de ces brainstormings, Lob débarque fièrement avec le livre de Planète, auquel il avait collaboré avec Jacques Sternberg et Michel Caen. Goscinny lit d’abord la préface, il est ravi, ensuite il regarde ce que les auteurs racontent à propos d’Astérix et là, je le vois devenir blême… »

Pour un amateur du médium comme moué, ce type d’ancien ouvrage me permet de découvrir des auteurs qui ont été totalement oublié, alors qu’ils avaient un succès certains à l’époque. Rappelons qu’en 1967, c’est encore la presse bd et ses nombreux titres qui assurent la reconnaissance de grands nombres auteurs et séries. Les auteurs connaissaient le succès grâce à la revue qui les diffuse plutôt que sur leur nom propre. Qui se rappelle, par exemple, des histoires de Hachel ou de Jean Alessandrini (les planches de ce dernier sont hallucinantes de modernité. On croirai du Chris Ware !)…

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