Marjane Satrapi nous invite à partager l’intimité d’un groupe de femmes s’adonnant à leur activité favorite : la discussion. Des femmes qui osent parler de tout, levant de nombreux tabous, mais uniquement entre-elles, lorsque les hommes font la sieste. Comme le dis très bien la grand-mère de Marjane : « parler derrière le dos des autres est le ventilateur du cœur »… Cet album est un hommage à sa grand-mère justement, une femme libre, au fort tempérament, vraiment en avance sur son temps.
On a donc droit à un joli lot de commérages, d’anecdotes croustillantes et d’histoires dramatiques, que chacune des protagonistes raconte l’une après l’autre. Une discussion libre, mais tout de même très codifiée. Chacune se doit de raconter une histoire en lien avec la précédente. Une histoire personnelle, ou concernant une connaissance familiale, amicale…
Le thème principal de cette « broderie » est : hommes – femmes, mode d’emploi. Car les « autres », se sont aussi les hommes… Nous pénétrons dans ces secrets d’alcôve, non pas en situation de voyeur, de voleur d’intimité, mais plutôt comme complice, voire comme confident.
Avec ce Broderie, Satrapi prolonge pour notre plus grand plaisir, son Persepolis. Sauf qu’elle n’est plus l’unique narratrice. Elle laisse la parole à ces femmes qui comptent beaucoup pour elle. Ses dessins sont plus épurés, quasiment sans décors, se centrant uniquement sur les personnages. Son style est plus lâché, plus proche de l’écriture. D’ailleurs sa calligraphie est moins appliquée, plus immédiate, comme écrite sur le vif… Un journal intime dessiné, cette petite bd nous en apprend beaucoup sur les valeurs et les mœurs de ces femmes d’Iran, qui sont bien plus libres et progressistes qu’on ne pourrait l’imaginer…
Je l’ai emprunté aujourd’hui à la médiathèque et viens de l’achever. j’ai trouvé ce petit livre absolument délicieux et retrouve mes impressions dans ta critique.
Dernière publication sur carnet à dessins : Voyage voyages
Délicieux est le bon mot, en effet !
j’adhère plus au style graphique de Broderies qu’à celui de Persépolis (même si j’ai préféré le second). Je trouve Broderies bien plus maitrisé, plus sur, se moquant des conventions (en quelque sorte) de mises en page. C’est innovant et j’aime ça. peut etre aussi parce que la grand-mère est plus présente et que c’était le personnage qui avait retenu mon attention dans Persépolis
C’est vrai qu’on sent Satrapi plus libre dans ce Broderies, plus à l’aise, comme Sfar avec son Missionnaire…
Ils sortent de la narration classique de la bande dessinée pour nous proposer des œuvres sans contraintes, plus personnelles…
De grands auteurs qui renouvellent le médium et ouvrent des perspectives nouvelles. On en redemande !