J’avais eu l’occasion de lire cette bd il y a une petite dizaine d’année, lorsqu’elle était éditée par les Humanoïdes Associées, dans la collection Tohu Bohu. Je la recherchais depuis mais ne fut pas facile à trouver en occasion. Je suis donc très content que Delcourt la réédite, dans un format comics et surtout, sur du papier sépia, qui lui confère un aspect vieillot qui sied à merveille à cette histoire emprunt de nostalgie et d’une certaine mélancolie.
Récit autobiographique, Seth nous raconte son existence de dessinateur-illustrateur rêveur (qui à chaque fois qu’il prend le train pense à Tintin), un peu passéiste, passionné de vieux livres, de beaux dessins, d’une vieille expo de dinosaures, de vieux vinyls… Un dessinateur au look année 50, souvent en décalage par rapport au monde qui l’entoure.
Un album tout en finesse, en subtilité. Seth est un maitre pour ce qui est de raconter ces petites choses imperceptibles de la vie de tous les jours, ces non-dits du quotidien (lors des repas en famille, des échanges avec son ami dessinateur, sa rencontre et sa vie de couple, ses recherches à propos d’un vieux dessinateur)… Ce qu’il nomme « les Plaisirs minuscules ». Une légèreté accentuée par ce style simple mais non simpliste, une ligne claire tout en arabesques, inspiré par Dupuy et Berberian sans en être une pale copie. Par ce gris bleu qui contraste admirablement avec ce « blanc-sépia » (bonne idée de Seth lui-même, chargé du Design graphique de cette réédition).
La formidable idée de ce récit, c’est cette mise en abîme de ce jeune dessinateur qui recherche des dessins et tente d’en savoir plus sur Kalo, un ancien dessinateur du New Yorker découvert par hasard. Il n’hésite pas, sur plusieurs années, à effectuer un travail d’archéologue, à sonder un nombre incalculable de piles (de strates) de livres chez les bouquinistes. De remonter dans le passé de ce dessinateur, en allant à la rencontre de sa ville natale, de sa famille…
Seth ne cherche-t-il pas à aller au fond de sa propre existence, de sa propre passion du dessin, par l’intermédiaire de ce dessinateur oublié ? Surement. Il est d’autant plus troublé par le style de Kalo qui est étonnamment très proche du sien. On peut y voir (et lui certainement) comme une sorte de filiation, de lien invisible qui l’incite à en savoir toujours plus, en découvrir toujours plus…
Une œuvre riche, admirable, qui sans en avoir l’air aborde les thèmes profonds du temps, de la mémoire, de l’existentialisme…
0 commentaire à “La Vie est Belle malgré tout – Seth (Delcourt, 2009)”