Encore un ouvrage difficilement classable, entre BD, livre illustré et story-board. Une sorte d’Opéra lyrique sur papier, que l’on peut lire en écoutant la musique éponyme de Henry TORGUE pour claviers, synthétiseurs et orchestre symphonique.
L’histoire de Lejalé, découpée en quatre actes (quatre époques plus précisément), est d’un registre mystico-cosmique. Une allégorie sur la création, la vie, la civilisation… La première époque nous parle de la Nuit des temps. Les dessins de Caza forment un long travelling avant, qui part de rien (du noir), avance vers une planète pour arriver à la vie (un enfant). La deuxième époque s’intitule Mémoire des écumes. Caza joue sur les contrastes entre matières minérales et organiques : il associe un homme drapé à des rochers, ou bien transforme un décors de pierre en corps de femme. La troisième : les Dieux et les masques est, comme son nom l’indique, plus figurative, plus théatrale (très Comedia Dell’Arte, avec tous ces masques). Et plus colorée. La quatrième : Comme l’ombre d’un souvenir termine l’histoire comme elle a commencé, par un travelling (inversé) qui nous fait partir de la planète, vers la lumière cette fois-ci. L’histoire commence donc avec une case noire, pour finir par une case blanche…
La narration emprunte beaucoup au cinéma (travelling, contre-champs…) et à l’illustration de texte plutôt qu’à la bande dessinée classique (pas de phylactères, pas de héros…). Le style de Caza oscille entre l’hyperréalisme (à certain moment, il travaille directement sur photos, pour les décors surtout) et Pop Art, avec ces couleurs flashy ! Justement, les couleurs de Caza sont magnifiques (au niveau de la technique, il me semble qu’il alterne entre gouache et aérographe) ! Toutes les gammes y sont présentes, chaque époque ayant leur dominante : bleu nuit pour la première, mauve et violet pour la deuxième, vert et rouge-orangé pour la troisième et retour au bleu nuit pour la dernière… J’ai personnellement une préférence pour la troisième époque, la plus contrastée. J’y retrouve toute la virtuosité de Caza ! Un maître incontesté de la science fiction dessinée !
Merci pour ce chouette article ! (Que je découvre bien tardivement !)
Merci à toi !