Une des meilleures maison d’édition BD – L’ Association – nous propose, depuis sa création (1990), plusieurs collections aux noms plutôt sympathiques : Eprouvette, Ciboulette, Eperluette, Archives, Côtelette, Mimolette et Patte de mouche… Cette multitude de formats et de prix traduit l’intention première de sa ligne éditoriale, à savoir vouloir diversifier la Bande Dessinée. Publier des auteurs de qualité et produire de beaux livres, accessibles à tous.
La collection Patte de mouche correspond tout à fait à cette volonté.
D’un format « nouvelle » souple de 10,5 -15 cm, 24 pages, pour un prix de 3 €, cette collection est la plus économique du catalogue. Mais la qualité n’en est pas moindre. Ces BD ne sont pas des grandes réduites, mais de véritables oeuvrettes créées pour l’occasion. Les auteurs utilisent toutes les possibilités offertes par ce format : histoires courtes, noir et blanc, visuels épurés…
Le premier volume de la collection (Imbroglio) est l’exemple type des BD proposées par cette « Patte de Mouche » : peu de personnages, unité de lieu, de temps, monochromie …
Dans cet absurde huis-clos entre 3 personnages, l’histoire possède tant de rebondissement qu’on ne peut en deviner la fin avant de l’avoir lu. Ce qui est appréciable dans la mesure où ça se lit vite. Le graphisme lui, est au service de l’histoire, simple et efficace (du Trondheim, quoi !)
La Nouvelle Pornographie est un véritable exercice de « stylisation » comme seul sait les faire Trondheim. Dans cette bd au titre évocateur, ce dernier simplifie, schématise les formes jusqu’à l’abstraction. Mais en y regardant de plus prêt, il s’agit bien de dessins figuratifs, plutôt explicites…
Autre particularité des histoires proposés par les auteurs de l’Association : l’autobiographie. Baladi nous raconte ici une anecdote vécu durant sa jeunesse, souvenir qu’il pourrait nous raconter au coin d’une table, autour d’un verre. « Un récit urbain et déglingué à base de paumés et d’embrouilles, transcendé par la syntaxe si particulière d’Alex Baladi » (Catalogue 2006 de l’Association.)
Mahler est un dessinateur Autrichien (Vienne) possédant un style unique. Minimaliste, il se sert de volumes géométrique simples pour symboliser plutôt que représenter des formes. C’est un figuratif à la limite de l’abstraction. J’adore.
Longueurs & Retranchements est un pur exercice de style digne de l’OuBaPo (créé et diffusé par l’Association). Cette histoire d’auteur face à son éditeur est en fait construite à partir d’un seul et même dessin (celui de la couverture). Pourtant, il y a une vraie histoire séquentielle, un vrai rythme dans cette BD. D’ailleurs, je ne me suis pas rendu compte tout de suite que c’était quasiment la même case à chaque fois, tant il se dégage une impression de mouvement. Bluffant.
Mystery Music lui, regroupe plusieurs historiettes sans texte, d’une page, ayant pour thème un instrument de musique. La musique elle-même – qui est impalpable – est représenté ici par une masse noire informe. De ce décalage absurde se dégage une forme d’humour, de poésie.
Poésie également avec l’Espignole, véritable carnet intime dans lequel Baudoin nous raconte ses souvenirs d’adolescent. Cet album est emprunt d’une certaine nostalgie et se veut essentiellement contemplatif. Structuré sur la forme d’un dessin par page incluant un texte en « voix off », l’Espignole est un bel ouvrage. Le style de Baudoin, expressionniste dans ses formes, ses contrastes et naturaliste dans ses thèmes, colle parfaitement à cette histoire de souvenirs, d’adolescence et d’amour perdus.
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